La loi d’orientation et de programmation du ministère de la Justice 2023-2025 a inscrit la réforme de la procédure de saisie des rémunérations dans un contexte de modernisations processuelles. La publication du décret n° 2025-125 du 12 février 2025 relatif à la nouvelle procédure de saisie des rémunérations confirme que cette réforme sera effective le 1er juillet 2025.
Cette réforme, qui entrera en vigueur le 1ᵉʳ juillet 2025, modifie substantiellement le rôle des différents acteurs et déjudiciarise la procédure en supprimant l’autorisation préalable du juge.
1 – Les principes fondamentaux de la réforme
- La déjudiciarisation de la procédure
La réforme repose principalement sur la suppression de l’autorisation préalable du juge de l’exécution, marquant ainsi une « déjudiciarisation » significative de la procédure.
Le juge de l’exécution n’interviendra désormais qu’à titre de contrôle, notamment en cas de contestation de la mesure de saisie par le salarié débiteur ou en cas de litige sur la répartition des sommes saisies.
- Le transfert des compétences aux commissaires de justice
Les commissaires de justice (profession née en 2022 de la fusion des métiers d’huissier de justice et de commissaire-priseur judiciaire) se voient confier la mise en œuvre de la procédure, en lieu et place du greffe du tribunal judiciaire.
Cette nouvelle attribution s’accompagne de la création d’un registre numérique des saisies des rémunérations, placé sous la responsabilité de la Chambre nationale des commissaires de justice.
2- Les obligations nouvelles des employeurs
- Les obligations déclaratives
L’employeur saisi devra fournir au commissaire de justice répartiteur, dans les 15 jours à compter de la notification de l’acte de saisie, divers renseignements dont la nature du contrat de travail, le montant de la rémunération versée au débiteur et les éventuelles saisies ou cessions déjà en cours.
En cas de défaut de déclaration ou de déclaration mensongère sans motif légitime, l’employeur pourra être condamné à une amende civile d’un montant maximal de 10 000 €.
- L’obligation de versement mensuel
L’employeur devra verser mensuellement les sommes retenues au titre de la saisie entre les mains du commissaire de justice répartiteur, dans les limites de la quotité saisissable.
S’il n’effectue pas ces versements, le commissaire de justice répartiteur en informera les créanciers et le débiteur, et le juge de l’exécution pourra, sur requête du créancier, condamner l’employeur au paiement des sommes concernées.
- Les obligations d’information en cas d’incident
L’employeur devra informer le commissaire de justice répartiteur, dans les 8 jours, de tout événement qui suspend la saisie ou y met fin, comme la rupture du contrat de travail.
En cas de notification d’une saisie administrative à tiers détenteur ou d’une demande de paiement direct de pension alimentaire, des obligations spécifiques s’imposeront à l’employeur.
3- La nouvelle procédure de saisie des rémunérations
Le commissaire de justice initie la procédure de saisie des rémunérations par le premier acte de la procédure qui est la signification par commissaire de justice d’un commandement de payer au débiteur (il n’y a plus ni requête au tribunal, ni tenue d’audience).
- A compter du jour de la signification, le débiteur dispose d’un mois pour, au choix
- payer les sommes dues
- trouver un accord avec le créancier
- contester la mesure
- Un mois après le commandement de payer, si aucun accord n’a été trouvé, le créancier doit dans un délai de trois mois, après désignation d’un commissaire de justice répartiteur, faire signifier son procès-verbal de saisie à l’employeur du débiteur. C’est le créancier (ou en d’autres mots son mandataire commissaire de justice) qui signifie la saisie au tiers (et non plus le greffe du tribunal qui l’a ordonnée).
Cette nouvelle phase initiale a un délai n’excédant pas 4 mois à compter de la signification du commandement de payer.
Le commissaire de justice répartiteur devient le principal interlocuteur des parties
La loi prévoit que pour mettre en œuvre la saisie sur les rémunérations, un “commissaire de justice répartiteur” est désigné parmi ceux figurant sur la liste maintenue par la Chambre nationale des commissaires de justice.
Ce commissaire de justice répartiteur, formé spécifiquement au suivi de la procédure, prend en charge les tâches assumées jusqu’au 1er juillet 2025 par les services du greffe du tribunal judiciaire : vérification du calcul des quotités, répartition des sommes saisies entre les créanciers… Il réalise les projets d’état de répartition, les états de répartition, les informations aux créanciers, au débiteur, au tiers saisi.
Sur une même procédure, pourront donc cohabiter un commissaire de justice « saisissant », qui enclenche et suit la mesure pour la créance concernée, et un commissaire de justice répartiteur qui est chargé de sa mise en œuvre.
Les frais de justice occasionnés sont supportés par le débiteur.