La loi du 29 novembre 2023 transpose l’accord national interprofessionnel (ANI) sur le partage de la valeur en entreprise, conclu en février 2023 entre les partenaires sociaux.
Aménagement de dispositifs existants
Cette loi aménage plusieurs dispositifs existants.
- En matière d’épargne salariale : intéressement, participation et plans d’épargne
- Participation
Une expérimentation, qui durera 5 ans, a pour objet d’inciter les entreprises de moins de 50 salariés à mettre en place la participation pour leurs salariés. |
Elles auront temporairement la possibilité de se doter d’un régime moins favorable que le régime légal, en appliquant une formule de calcul de la réserve spéciale de participation dérogatoire.
Pour cela, ces entreprises auront la faculté :
- soit d’appliquer un accord type de participation conclu au niveau de la branche (la loi donnant par ailleurs aux branches jusqu’au 30 juin 2024 pour ouvrir des négociations sur la création d’accords-type avec formule dérogatoire) ;
- soit de conclure leur propre accord selon les règles spécifiques à la participation
Actuellement, une entreprise qui atteint un effectif de 50 salariés alors qu’elle est déjà couverte par un accord d’intéressement bénéficie du délai de 5 ans au titre du dispositif de gel des effets de seuil « sécurité sociale », auquel s’ajoute le délai de 3 ans au titre des 3 exercices clos de l’intéressement. Au total, l’assujettissement à la participation peut être décalé de 8 ans. |
Pour mettre fin à cette situation, la loi supprime le délai supplémentaire de 3 ans dont bénéficient les entreprises déjà dotées d’un accord d’intéressement.
La loi admet désormais, comme pour l’intéressement, de prévoir dans l’accord de participation, le versement d’avances sur le résultat de la participation.
- Intéressement
La participation comme l’intéressement peuvent être répartis de façon uniforme, proportionnellement aux salaires, proportionnellement à la durée de présence ou en combinant ces différents critères.
La loi sécurise la possibilité de prévoir, en cas de répartition proportionnelle aux salaires, de fixer un salaire plancher, un salaire plafond ou les deux, servant de base au calcul de la part individuelle.
- Plan d’épargne
La loi institue une nouvelle procédure simplifiée, uniquement pour les modifications qui visent à ajouter de nouvelles possibilités d’affectation des sommes recueillies (notamment l’ajout de nouveaux supports de placement, précise l’étude d’impact). Dans ce cas, la modification peut être mise en œuvre sur simple information des entreprises parties prenantes. Dans cette procédure particulière, il n’y a donc pas de possibilité d’opposition.
Orientation de l’épargne vers des « fonds verts » à partir du 1er juillet 2024. – Les plans d’épargne d’entreprise et les plans d’épargne retraite doivent prévoir qu’une partie des sommes recueillies peut être affectée, dans certaines limites, à l’acquisition de fonds investis dans des entreprises solidaires d’utilité sociale.
La loi prévoit que, à compter du 1er juillet 2024, le règlement du PEE devra également offrir la possibilité d’affecter une partie des sommes épargnées à l’acquisition de parts « d’au moins un fond labellisé ou d’un fond nourricier d’un fond labellisé au titre du financement de la transition énergétique et écologique ou de l’investissement socialement responsable ». La liste des labels en question sera fixée par décret.
- Prime de partage de la valeur (PPV)
La loi apporte plusieurs améliorations au régime de la PPV avec :
- La possibilité pour l’employeur de verser deux primes par année civile, contre une actuellement ;
- Le maintien du régime renforcé d’exonération sur 2024, 2025 et 2026 dans les entreprises de moins de 50 salariés ;
- La possibilité de placer la PPV sur un plan d’épargne salariale ou d’épargne retraite d’entreprise, et de l’exonérer ainsi d’impôt sur le revenu.
Nouvelles obligations pour les entreprises réalisant un certain niveau de bénéfice
- Entreprise de 11 à moins de 50 salariés.
La loi crée une nouvelle obligation à compter du 1er janvier 2025 sur une période de 5 ans, pour les entreprises de 11 à moins de 50 salariés de se doter d’un dispositif de partage de la valeur totalement déterminé par l’entreprise (participation dérogatoire, intéressement, PPV, abondement au PEE / PEI / PER) dès lors qu’elles remplissent les 3 conditions cumulatives :
- Connaître un bénéfice net fiscal au moins égal à 1% du CA pendant 3 années consécutives (2022, 2023, 2024) ;
- Être constituées en sociétés (donc non applicable aux indépendants) ;
- Ne pas avoir déjà mis en place un dispositif (participation, intéressement, PEE, PEI, PER) au titre de l’exercice considéré.
- Entreprises de 50 salariés et plus.
La loi crée une obligation pour les entreprises de 50 salariés et plus afin qu’elles négocient sur des modalités de partage de la valeur en cas de bénéfice exceptionnel.
Les entreprises de 50 salariés et plus pourvues d’au moins un délégué syndical et soumises à l’obligation de mettre en place la participation engagent une négociation (obligation de moyen) avant le 30 juin 2024 relative à la mise en place d’une clause sur les résultats exceptionnels dans le cadre des négociations habituelles sur la participation ou l’intéressement.
Cette négociation devra porter sur la définition d’un bénéfice exceptionnel de l’entreprise et les modalités de partage de la valeur qui en découlent pour les salariés en recourant à l’une des trois options suivantes :
- Soit le versement d’un supplément de participation ;
- Soit le versement d’un supplément d’intéressement ;
- Soit l’ouverture d’une nouvelle négociation ayant pour objet de mettre en place un dispositif d’intéressement s’il n’en existe pas, une prime de partage de la valeur ou un abondement à un plan d’épargne (PEE, PERCO ou PERE-CO, le cas échéant interentreprises).
Nouveau dispositif : le plan de partage de la valorisation de l’entreprise
La loi pose le cadre d’un nouveau dispositif, le « plan de partage de la valorisation de l’entreprise » (PPVE).
Ce dispositif, dont la mise en place par accord sera facultative, vise à permettre aux entreprises de verser à leurs salariés, dans un cadre social et fiscal incitatif, une « prime de partage de la valorisation de l’entreprise » lorsque la valeur de l’entreprise augmente sur une période de 3 ans.
Pour chaque salarié, la prime de partage de la valorisation de l’entreprise serait égale au produit d’un montant de référence lui ayant été attribué au titre de l’accord et du pourcentage de variation de la valeur de l’entreprise sur 3 ans, lorsque ce pourcentage est positif. Autrement dit, ce n’est qu’après la période de 3 ans qu’une prime pourrait-être versée.
En pratique, ce dispositif permettrait ainsi d’intéresser les salariés à la valorisation de l’entreprise (et pas seulement à ses résultats), tout en les fidélisant. En effet, seuls les salariés présents sur les 3 années pourraient percevoir cette prime. Un décret d’application sera nécessaire pour qu’il devienne pleinement opérationnel.
Loi N° 2023-1107 du 29 novembre 2023
Nous reviendrons en détail sur cette loi et les obligations qui en découlent lors d’un prochain 8.40 prévu le vendredi 19 janvier 2024. (Réservé à nos adhérents) |