Rappels préliminaires :
- en cas de déclaration d’inaptitude prononcée par le médecin du travail, lorsque, à l’issue d’un délai d’un mois, le salarié déclaré inapte n’est ni reclassé ni licencié, l’employeur lui verse, dès l’expiration de ce délai, le salaire correspondant à l’emploi que celui-ci occupait avant la suspension de son contrat de travail, y compris en cas d’inaptitude à tout emploi dans l’entreprise constatée par le médecin du travail (C. trav. art. L. 1226-4 et L. 1226-11).
- selon l’origine de l’inaptitude, la situation du salarié diffère :
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- si l’inaptitude a une origine professionnelle, le salarié a droit à une indemnisation de la sécurité sociale pendant la période d’attente (C. séc. soc. art. L. 433-1), appelée « indemnité temporaire d’inaptitude » et versée jusqu’au reclassement ou au licenciement, dans la limite d’une durée maximale de 1 mois.
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- si l’inaptitude n’a pas une origine professionnelle : si le salarié n’a pas d’arrêt de travail, il ne reçoit ni indemnisation ni maintien de salaire. Si le salarié est de nouveau placé en arrêt de travail, l’indemnité temporaire d’inaptitude n’est pas versée et se pose alors la question de la rémunération du salarié.
La Cour de cassation répond à cette interrogation dans l’affaire ayant donné lieu à sa décision du 29 janvier 2025.
Un salarié avait été placé à plusieurs reprises en arrêt de travail pour maladie (de droit commun) :
- du 1er décembre 2016 au 31 mars 2017 ;
- du 4 avril au 12 avril 2017 ;
- enfin du 14 avril au 28 mai 2017.
Le médecin du travail avait rendu un avis d’inaptitude le 13 avril 2017 (exactement entre l’arrêt de maladie n°2 et l’arrêt de maladie n°3), dans lequel il indiquait que l’état de santé du salarié faisait obstacle à tout reclassement dans un emploi. Le salarié avait ensuite été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 30 juin 2017.
Le salarié avait saisi le conseil de prud’hommes, demandant le maintien de son salaire au titre de la convention collective. Le salarié estimait que qu’il aurait dû continuer à bénéficier de ce maintien de salaire pendant son arrêt de travail du 14 avril au 28 mai 2017, en se fondant sur 2 points :
- pour la période au titre de laquelle l’employeur devait reprendre le paiement du salaire faute de reclassement ou de licenciement du salarié, soit ici à partir du 13 mai ;
- les dispositions conventionnelles sur le maintien de salaire n’excluaient pas leur application en présence d’une inaptitude.
De son côté, l’employeur considérait qu’à compter de la déclaration d’inaptitude du 13 avril 2017, le salarié « avait basculé » dans le régime de l’inaptitude, et que les dispositions relatives au maintien de salaire conventionnel ne trouvaient plus à s’appliquer. Sa seule obligation était de reprendre le versement de l’intégralité de la rémunération un mois après la déclaration d’inaptitude.
Les juges du fond avaient fait droit aux arguments de l’employeur, en considérant que l’avis d’inaptitude faisait obstacle à ce que le nouvel arrêt de travail du 14 avril au 28 mai 2017 ouvre une nouvelle période de suspension du contrat de travail, et donc à l’application du maintien de salaire conventionnel. Le salarié était bien sous le régime de l’inaptitude.
La Cour de cassation a validé la décision des premiers juges : elle a souligné que les juges d’appel avaient retenu que la délivrance d’un nouvel arrêt de travail à un salarié déclaré inapte par le médecin du travail ne pouvait avoir pour conséquence d’ouvrir une nouvelle période de suspension du contrat de travail et de tenir en échec le régime applicable à l’inaptitude. C’est donc à juste titre que la Cour d’appel en avait déduit que le salarié était, à compter du 13 avril 2017, sous le régime de l’inaptitude, en conséquence la suspension du contrat de travail ouvrant droit au maintien du salaire avait pris fin.
Cass. soc. 29 janvier 2025, n° 23-18585 FD